jeudi 28 novembre 2013

Episode 32 : Big bisous


Que l'on travaille sur les marchés, la chine, les fêtes de 3 jours ou les grosses foires, il y a des attitudes immuables à notre mode de vie...à notre culture.

Chaque matin et chaque soir de leur vie les gens normaux appelés chez nous les paysans se bisent entre eux afin de célébrer retrouvailles et adieux.

Et ainsi en chaque lieu :

- « Bonjour Papa, Bonjour Maman », Smack-smack autour de la table de la cuisine.

- « Bonjour les voisins », Smack-smack sur le palier.

- «  Bonjour les collègues », Smack-smack dans l'ascenseur.

- «  Bonjour les copines », Smack-smack façon Catherine et Liliane de Canal+.

Là je dis STOP !!!

Et maintenant bienvenu chez les voyageurs.

Malgré tout le respect que nous nous devons : Arrêtez de nous licher la gueule en toutes occasions !

Lydia et Sophie doivent rencontrer la famille (nombreuse) de leur beau-père.

Leur maman a eu la chance de retrouver le bonheur auprès d'un homme gentil et travailleur.

Le pauvre n'a qu'un seul défaut, c'est un gadjo...et sa famille aussi, forcement.

Le premier jour, Lydia et Sophie font connaissance.

- «  Bonjour » ...4 bises à Tata Jo

- « Bonjour » ...4 bises à Tonton Luc

- « Bonjour » ...4 bises à Cousin Pierre

Etc, etc, etc... 9 personnes de plus dans la vie de maman.

La journée est agréable, les filles sont rassurées, la famille leur plaît.

Au moment du départ la cérémonie des « au revoir » ressemble à s'y méprendre à la cérémonie de bienvenue.

L'haleine est juste plus chargée en alcool chez certains.

Les autres visites de Lydia et Sophie se dérouleront autrement à l'avenir, elles ne sortiront pas de la voiture lorsqu'elles passeront prendre leur mère au terrain.

Beau-papa se vexe, c'est naturel:

« Qu'est-ce qu'elles ont tes filles ? »

Elles ont que le lichage est toléré à la première rencontre ou après une longue séparation.

Passé les embrassades chaleureuses des retrouvailles, un signe de tête, un « bonjour mon oncle » ou « bonjour ma tante » (terme respectueux envers un aîné même non familier) sans accolade, un sourire suffisent à faire passer le message.

Nous n'aimons pas que l'on nous touche c'est comme ça, une immense pudeur dans les gestes.

Les familiarités, les papouilles sont réservées à nos proches: Papa/ Maman/conjoint/enfants.

Même les jeunes (ou vieux) mariés ne s'embrassent pas en public.

Maintenant que Beau-papa connait les coutumes Lydia et Sophie pourront descendre de l'auto à la prochaine visite.

Promis juré la famille les accueillera sans poser leurs mains et leurs lèvres un peu partout.

Les filles diront : « Bonjour mon oncle » à leur beau-père (?).

Quand elles l'adoreront elles le biseront de bon cœur.


dimanche 24 novembre 2013

Episode 31 : Inspecteurs des travaux finis


A quel âge sommes nous émancipés et indépendants chez les forains ?...

A l'aube de sa vie bien remplie mon arrière grand-mère affublait son fils aîné de 65 ans du charmant sobriquet de "petit encu***" !

Les 87 ans de Mémère Bach lui conférait entre autre le titre honorifique d' inspectrice des travaux finis.

Cette situation faisait rire toute la famille , à l'exception de l'oncle Albert qui ne fut libérer des conseils (pardon , des injonctions ) de sa matriarcale foraine de mère qu'au décès de celle-ci.

Mémère Bach avait bien des excuses, veuve assez jeune, sans argent mais au caractère façonné dans la roche, elle dû prendre sous son aile sa belle fille de 36 ans veuve elle aussi, aider à transformer 3 fillettes (2 ados et un bébé) en redoutables femmes d'affaires.  

C’était une autre époque, marche ou crève, la formation professionnelle de Désirée se résumait en acrobaties et pirouettes. Edith Piaf en justaucorps léopard.

Si mon arrière grand-mère Désirée Bach née Bouvier (clin d’œil affectueux à tata Micheline) refusait à son fils une liberté matérielle, elle éduquera ses petites filles comme des garçons afin que celles-ci ne dépendent jamais d'un mari lunatique.

Les vieux ne peuvent pas s'en empêcher, donner leur avis sur ta façon de poser ton calage c'est plus fort qu'eux.

Tu râles parce qu'il y aura 50 cm de surélévation au bout du métier ? Le père posait un scooter sur des bidons de 500 l et on pouvait quelques fois passer debout sous la semelle.

Il fait froid dans ta baraque ? Les parents travaillaient avec 30 cm de neige alors que cet hiver tu iras te faire bronzer sous un soleil lointain.

Arnaud (40 ans) a lui aussi son inspecteur des travaux finis .

Arnaud a beau revendiquer sa liberté d'action, ses 1.80 m ne lui sont d'aucune utilité quand Yoyo (son père) pointe le bout de ses moustaches devant la caisse contrôle du manège.

La chanson disait "je me suis fait tout petit devant une poupée"...
chez nous les poupées sont Papa et Maman.

Et leurs avis valent de l'or.

Ils sont remplis de 100 ans d'expérience, d'un mode de vie difficile qu'ils ont subi bon gré mal gré.

Ils ne savent pas tout, mais suffisamment assez.

Nous prenons souvent leurs conseils pour des reproches alors que ça n'est que des mots d'amour mal traduits.

Ils ne nous les expriment que de la façon dont ils les ont entendus eux-mêmes : à coup de bottes dans le cul ! 

Quant à moi je termine cette chronique vite fait, c'est dimanche.

Si mon inspecteur des travaux finis passe et ne me voit pas au boulot il sera très déçu...

... et je ne veux pas décevoir mon papa.

vendredi 22 novembre 2013

Episode 30 : Autorisation de circuler, y a rien à voir


Samedi en rentrant du boulot je me fais arrêter par les chmits.

Ma caravane n'est pas sur la place...manque de place justement...je passe ma foire du Trône à faire les aller/retour entre Paris et Noisy le Grand.

Nous avons la grande chance (Merci Mémère) de résider dans un terrain familial à 12 km de la baraque.

Ce n'est pas une catastrophe en soi , tous les gadjés prennent bien les transports le matin pour aller travailler.

Normalement je devrais dormir à proximité de mon métier puisque ma maison c'est une caravane, si je vais monter à la Foire de Lille (de Lyon , de Cannes , de Trifouillis-les-oies) Mémère ne possédant pas de terrain privé là-bas, mon logement sera forcément caché entre 2 camions derrière les baraques à frites.

Donc, revenons à nos motards, je vais devoir leur expliquer ce que mon père appelle "mon comportement bohème"...que je n'ai pas les papiers de la voiture ...que je sais que le phare est cassé et éteint...que je reviens de la Foire du trône ou je travaille...
" Vous avez vu j'ai tout mes permis ?"
C'est nul mais je fais ce que je peux.

Je ne mets jamais en avant mon nom de famille , la dernière fois ça m'a coûté 300 € de procès...

Mon comportement bohème et Mr Campion "le patron de la grande Roue ?" ne font pas toujours bon ménage sur l'autoroute A4.

Comme je l'y invite le motard casqué fixe son attention sur les permis validés de mon papier rose.
"Vous savez que vous avez 6 mois de retard pour votre visite médicale ? Le permis n'est plus à jour."
Ouf j'étais en auto.

Papa si tu lis cette chronique prend rendez-vous pour moi à la préfecture. STP merci.


" - Comment ça se fait que vous ayez une adresse ?
 - Ben je suis domiciliée , on n'a pas tous un carnet de circulation..."
Là je vais expliquer aux sédentaires qui lisent mes chroniques ce qu'est un carnet de circulation.


Moi j'appelle ça un Carnet de discrimination.

La loi de 1969 instituait notamment :

- Un livret de circulation pour les personnes, y compris françaises, n’exerçant pas d’activité ambulante mais logeant de façon permanente dans un habitat ou abri mobile dès lors qu’elles justifient de ressources régulières suffisantes.

- Un carnet de circulation pour ces mêmes personnes dès lors qu’elles ne justifiaient pas de ressources suffisantes.


Ces dispositions ne s’appliquaient ni aux personnes sans abri, ni aux bateliers, et donc de fait seulement aux gens du voyage.

Si je résume :

- Les SDF vivant dans la rue (par définition sans domicile) peuvent obtenir une carte d'identité (et tant mieux).

- Les voyageurs doivent pointer à la préfecture tous les 3 mois.

Depuis l'Europe cette disposition est illégale, elle est modifiée (seulement et non abrogée) depuis 2012 :

S’agissant du carnet de circulation, document à viser tous les 3 mois, et dont l’absence était passible de prison, le Conseil a considéré que cette contrainte portait une atteinte disproportionnée à l’exercice de la liberté d’aller et de venir.

Il a également estimé qu’une disposition de la même loi obligeant ces personnes à attendre 3 ans avant de pouvoir s’inscrire sur les listes électorales dans la commune de rattachement, restreignait de manière injustifiée l’exercice des droits civiques.

 - Les Roms voyagent en France avec une carte d'identité roumaine.

- Les forains non domiciliés, c'est à dire non propriétaires, justifient de leur citoyenneté française par un tampon sur un carnet discriminatoire.

Amis Gadjés, vous avez raison de nous prendre pour des gens spéciaux.

Mais ça va mieux : la loi de 1912 nous imposait d'avoir un carnet anthropométrique ;


Histoire de prouver que nous n'étions pas des animaux. 




mardi 19 novembre 2013

Episode 29 : Wonder Woman


Sandy a divorcé cet hiver.

Les raisons en sont personnelles, ça ne regarde personne. 


Mais chacun a sa petite idée sur cette affaire privée.


Les hommes pensent que David a bien eu raison de quitter cette souillon (supposé), les femmes donnent raison à Sandy puisque le mari n'était pas fidèle (confirmé).

Personne n'est charitable dans son analyse de la situation, chacun y trouve en miroir ses propres problèmes.


En vérité Sandy et David ne s'aiment plus. Point barre. Et David veut sa liberté.


Ils vont essayer de ne pas se haïr quand ils se croiseront dans les foires communes.


Une nouvelle vie commence pour Sandy et pas des plus faciles.


Elle élèvera seule les enfants, ici pas de garde alternée.


Déjà pas évidant de bouger toutes les semaines, l'école, la caravane, la baraque, les enfants s'adaptent plus vite que prévu mais ils verront papa si moins de 200 km les séparent de lui.  


Sandy garde la caravane, en dehors de ça elle reprend tout à zéro.


Quelques fois elle a l'impression que c'est à -100.


Une femme seule sur les fêtes foraines c'est Wonder Woman, rien a voir avec une vie de mère célibataire sédentaire


Heureusement 15 ans de mariage lui ont appris de nombreux métiers d'hommes.


Les petits soucis du quotidien mine le moral de Sandy, la fuite d'eau sous la caravane, elle répare seule.


La rallonge qui fuit à l’intérieur quand il pleut c'est plus problématique.


Elle attendra le dernier moment pour demander à son père de voir ce qu'il peut faire.


Sandy bataille chaque semaine afin de se placer avec la pêche aux canards sur une fête, croisant des amis qui se poussent pour la laisser monter, parfois des concurrents hargneux qui n'ont pas de compassion pour cette femme dans la merde.


Les concurrents aussi ont leur mouscaille à gérer.  


Les copines désertent un peu aussi ,"une femme divorcée à ta table c'est le loup dans la bergerie" disait ma tante.


Sandy connait cette maxime et pour ne pas mettre ses copines dans l’embarras des cancans malveillants elle décline les invitations les unes après les autres...


Reste la famille...et surtout la rage de s'en sortir.


Comme 98 % des femmes de son âge Sandy n'a connu qu'un homme dans sa vie.


Sandy ne savait pas qu'on doit essayer son "jeans" avant de l'acheter, sa mère et ses grand-mères ont jugés le leur à vue d’œil, sur pieds.


Pas question de rendre "la marchandise" une fois utilisée...on n'est pas chez H&M !


David lui, dans sa jeunesse aurait pu ouvrir une friperie avec tous ses vieux "jeans" grappillés sur les grimpettes de son métier.


D'ailleurs en parlant de David, Sandy vient d'apprendre qu'il s'est déjà remarié...


... prends ça dans ta face de femme libre mais pas libérée.


Wonder Sandy ne se laisse pas abattre, un jour un forain divorcé lui aussi l'aidera à caler la pêche aux canard.


Les cancans reprendront : la Sandy fréquente le Marco !


Sauf que cette fois elle aura le droit d'essayer avant d'acheter.


mardi 12 novembre 2013

Épisode 28 : En voiture en voiture



La marchande de poissons est reconnaissable sans son étal ,le forain aussi.

Francky frime à la caisse de son métier.

Le micro le rend trop sexy.

Les petites minettes sur les grimpettes ne résistent pas à la voix rauque en écho.
"Prenez vos tickets à la caisse. C'est chaud, c'est chaud, c'est chaud bouillant !"
Si elles savaient les petites gavalies suppliant un regard  Francky n'a qu'un seul amour: Le Super Mega Dancer

Les mots doux susurrés au micro pour exciter les jeunes filles n'ont comme effet principal que de nourrir cet amour si particulier.

Quelques petites phrases apprises par cœur , beaucoup d'improvisation et des fautes de français.

Francky tope, Francky déchire, Francky aime ça !

Que serait la foire sans ses micros Gougeon et notre vie sans ses boniments ?

Pierre Bellemarre fréquentait-il la fête foraine dans son village natal ?

Parce que vendre au téléachat un tire bouchon électronique wifi c'est comme convaincre une famille entière de monter sur ton métier, encore plus difficile si le métier en question fait vomir.

Bébert à la caisse de l'Appollo avait un discourt très impolitiquement correct.
" allez tout le monde peut monter les petits , les grands , les tontons , les tatas , les pédés ..." j'en passe et des meilleures.
Et ça marchait du tonnerre , la clientèle aimait entendre ça aussi, rigoler du voisin qui perdait sa perruque avant la fin du tour.

Sacré Bébert qui nous appris certaines ficelles du métier , les autres il se les mettait en pratique , pas question de se la faire mettre par le concurrent.

Les nénettes et les minettes surexcitées sur les grimpettes trouvaient Bebert très sexy ...il avait pourtant l'âge d’être leur grand-père.

Calé dans la caisse du métier , table de mixage et commandes en mains , Francky est le roi du monde aujourd'hui.

Une petite gavalie finira par capter son regard...

Le matériel de Pierrot Gougeon sauva bien des jeunes boutonneux tchatcheurs d'une adolescence solitaire.

Pour moi les plus doux des boniments de la Foire du Trône sont les " En voiture , en voiture ! " de 2 mamies vieillissantes accrochées à leur archaïque manège enfantin.

Les voix nasillardes de Gilberte et Rolande me racontent la vraie vie des forains.

4 mots en rengaine...

4 mots irritants....

4 mots entendus depuis toujours...

Les clients ne s'y trompent pas , les mamans connaissent bien ce " En voiture , en voiture " d'un autre age.

Si je ferme les yeux , je l'entends moi même , " En voiture , en voiture " 

Pas sexy comme Francky , sur le métier de Gilberte et Rolande , les nénettes ont 3 et 5 ans ... elles s'appellent Mila et Cassie

samedi 9 novembre 2013

Episode 27 : La boite à sayave


Dans une autre de mes chroniques je vous parlais du "con de la vache".

Où quand l'argent ne rentre pas pour cause principalement extérieure et involontaire.

Il existe aussi un autre cas ou l'argent ne rentre pas comme il faudrait : celui de la présomption d'avoir acheté un manège révolutionnaire.

Sauf s'il s'avère révolutionnaire dans les emmerdes.

Pourtant ça démarrait bien tout ça, le banquier bobo convaincu, le placier de la foire super fier de présenter une nouveauté en zone bleue, la bouteille de champagne cassée sur la grimpette.

Au moment du coup à boire, déjà les invités babinent entre eux .
" Ça, ça va pas faire une tune..."
Ce que n'oseront jamais vous avouer les copains, c'est que vos chances de dimanches malheureux se voient comme le nez au milieu de la figure (ou comme une banane au milieu de la fête). 

D'abord ce métier là, ne va pas plaire aux clients, c'est un métier "bâtard": trop gros pour les enfants trop enfantins pour les ados. 

Ensuite il est trop haut aussi, la première grimpette est à 20 cm. Mine de rien c'est important la montée sur le manège.

Et pourquoi tant de barrières sur le devant ? 

Et la caisse en haut du métier ? 

On t'apprends dès tes 6 ans les astuces du forain, qu'en as-tu fait mon ami, sont pas rentrées dans ton cerveau ?

Les week-end sans dérouiller s’impriment bien par contre.

Je ne souhaite à personne de connaitre les ratages de l'investissement festif souvent très lourd à porter (entre 500.000 et 1.000.000 d'euros)

Y a pas de raison ,ce qui ne marche pas à Paris ne plaira pas plus à Lyon.

Seul moyen de s'en débarrasser: Un tarif de vente très attractif (pas loin du prix de la ferraille au poids) et un crédit vendeur sans garantie.

Celui qui aura perdu son mariage dans cette mauvaise affaire n'aura plus rien à perdre.

C'est triste.

Un autre ratage financier : quand un forain pense qu'il gagnera beaucoup d'argent sans beaucoup de boulot.Un truc qui s'installe en 2 heures/calage compris.

On dira " Facile à monter , Recette facile à compter ! "

Dans ce cas il achète une "boite à Sayave"...c'est à dire un métier qui fait rire les copains.

Beaucoup moins la femme et les enfants.

Le métier forain c'est du boulot, on n'a rien sans rien.

C'est normal que celui qui investi sueur et foi en son banquier soit récompensé de ses efforts.

Moi je suis contente quand les nouveautés plaisent aux jeunes et font la fortune du "patron du manège".

Parce qu'un gros métier qui fait des sous fait bosser les petites baraques installées 50 m à la ronde.

J'en sais quelque chose.

Je remercie chaque jour de la Foire ma voisine la "nouveauté 2003" de plaire encore autant à mes clients et à son propriétaire de ne pas avoir investi dans une "boite à sayave".

Ps: attention , une boite à sayave n'est pas une BOITE A RIRE.
Une boite à sayave c'est un métier que personne ne conseillera à sa famille ...
 

dimanche 3 novembre 2013

Episode 26 : Hivernage




Chanceux que sont les enfants, confortablement installés sur le canapé, dégustant un bon repas...

Malchanceuse la maman qui fera la vaisselle à l'eau du jerrycan,  comme bon vieux temps du camping Paradis de Saint Jean de Mont...

Chanceux celui qui remise dans le sud de la France sous les palmiers...

Malchanceux le papa qui doit dégeler les tuyaux d'eau et d'écoulement par -10 degrés...


Chanceux le forain qui quitte son camping pour passer l'hiver entre 4 murs en briques...

Malchanceux le forain qui ne sait pas où aller...

Quand j'étais gosse les terrains dont quelques heureux forains étaient propriétaires regorgeaient de copains qui rentraient en remise.

Pas un kopeck frais ne passant le marche-pied de la caravane de décembre à mars, la solidarité jouait son rôle à fond.

Ces terrains loin de tout, autorisés à l'achat des gens du voyage sont maintenant pris en sandwichs par des lotissements où le vis à vis des caravanes est devenu indésirable.

Là aussi la disparité pointe le bout de son nez , le forain doit se conformer à la civilisation qui l'entoure, ça se traduit par faire construire une maison et rentrer dans le rang de la sédentarité.

Mais comment faire quand ton travail t’emmène loin de chez toi 10 mois de l'année, que ton fond de commerce se déplace en 3 convois?

Pour le moment quelques zones industrielles et municipalités sympa ferment les yeux.

Malheureusement les copains doivent remiser ailleurs. 

Galère de la vie de forains, s.d.f en roulotte de luxe.

Adulte, j'ai passé des mois de janvier et février chez les uns , chez les autres, une seule table où se mélangeaient les portes-monnaies, les repas, les cafés pris en commun.

Ils sont pour moi des souvenirs aigre-doux où la misère côtoyait l'aisance.

Comme un film qui nous a plu mais que l'on ne veut pas revoir...

Je garde trop au fond du ventre l'angoisse de passer un hiver sans argent, sans eau à cause du gel, sans chauffage quelquefois...

Chanceux les forains qui oublient les galères le printemps revenu...

Malchanceux celui qui voit arriver l'hiver dans 15 jours...

samedi 2 novembre 2013

Episode 25 : Revenir...


On en a tous entendu parler à un moment de notre vie, certains en connaissent un ou même plusieurs , d'autres en ont dans leur propre famille.

Les familles les soutiennent comme elle le peuvent.

Pourtant ces gens-là ne font pas de bruit, ils font ce qu'ils ont a faire, c'est tout.

Un sujet presque honteux: Les forains qui quittent le métier.

Pour les personnes qui seront tentées par l'aventure sachez que 
vos amis ne vous parleront plus ou très peu.

Vous ne serez plus invités nulle part, vous ne serez plus ni parrain ni marraine.Vous apprendrez les mariages des jeunes par les "on dit".

Forcement vous serez loin des yeux... synonyme parfois de loin du cœur.

J'exagère juste un petit peu.

Mais comprenez amis (encore) forains qui seraient attirés vers les lumières de la vie de paysans que personne ne vous attends là-bas.

Au début une lassitude, une clientèle intraitable, une dépression, la fatigue d'un boulot difficile, l'age avancé, l'espoir d'une vie meilleure, la stabilité espérée pour les enfants, une bonne affaire, des études supérieures : autant d'excellentes raisons pour sauter le pas.

Finie la vie en caravane et tous ses inconvénients : l'eau qui gèle en hiver, la promiscuité, les regards curieux souvent malveillants, pas de place pour se garer, entre autre...

Finis les montages et démontages incessants, les convois avec leurs emmerdes, les semaines de 60 h à faire 50 € par jour, les concurrents qui te chicanent à chaque placement, les enfants qui loupent des jours d'école.

Tout à notre nouvelle implantation réussie ou non, nous passeront sous silence notre nostalgie de la vie d’antan.

Oui, finie la vie en caravane, les grillades improvisées les jours de beaux temps, la sensation de sécurité à vivre en communauté, la liberté de choisir ses voisins, le décor vu de la fenêtre de la chambre qui change chaque semaine ...

Dans le travail les prises de bec avec les forains te manqueront, parce que ceux-là te comprenaient sur le fond du problème. Contrairement au paysan qui appellera la gendarmerie dès qu'il te verra sur le pas de sa porte. 

Les chicanes ne se régleront plus à coups de gueules, elles se régleront à coups de papiers bleus.    

Les plus sociables d'entre nous qui auront appris très tôt à se faire des amis chez les gadjés supporteront plus facilement la situation et ne regretteront pas leur choix.

Juste un pincement au cœur devant les photos des neveux qu'ils ne verront plus grandir sous leurs yeux. 

Dans mon cas, je ne m'y fait toujours pas de ne pas voir grandir mes petites filles.

Je ne me suis pas fait tellement d'amis, mes concurrents glaciers ne sont pas des cousins.

En dehors du pas de porte la solidarité n'existe pas.Comme on dit chez nous " tout est dans la façade ".

J'envie ceux qui s’intègrent dans leur nouvelle vie.

Lorsque les nouveaux exilés que nous sommes rentrons au bercail de nos foires tant aimées , nous sommes un peu déconnectés.

Les " Tiens qu'est ce que vous faites là ?" fusent assez régulièrement.

Je sais que ce n'est pas méchant , c'est juste un étonnement bien mérité.

A leurs yeux nos avons déserté la vie de nos anciens, comme si nous étions meilleurs que ceux qui continuent...

C'est pour cette raison qu'ils nous oublient un peu, c'est de bonne guerre.

Moi j'ai coupé la poire en deux : Je suis foraine à mi-temps pour le travail , à plein temps dans mon cœur.